Les Nordiques de Québec ont joué leur premier match en 1972, dans la défunte Association mondiale de hockey (AMH). Ce n’est qu’en 1979 qu’ils ont fait leur entrée dans la Ligue nationale de hockey (LNH), au moment de la fusion des deux ligues. La rivalité naturelle entre les deux villes aurait dû lancer les hostilités rapidement mais la timide performance des Nordiques à leurs premières saisons dans la LNH a calmé les ardeurs des partisans.
En 1982 cependant, tout s’est mis en place, grâce à un premier affrontement en séries éliminatoires. C’est le but gagnant de Dale Hunter dans la prolongation du 5e match décisif qui a fait naître la rivalité. Chaque match disputé par la suite entre les deux équipes est devenu un événement médiatisé à l’extrême. Malgré quelques saisons difficiles pour les Nordiques à la fin des années 80, la rivalité est restée intense jusqu’en 1995, année où l’équipe a quitté Québec pour s’établir à Denver sous les couleurs de l’Avalanche.
Entre 1982 et 1995, les équipes du Québec se sont affrontées 5 fois en séries de la Coupe Stanley. Les Canadiens ont remporté 3 séries, contre 2 pour Québec. Outre le but gagnant de Dale Hunter en 1982, on se rappelle bien sûr du match du Vendredi Saint en 1984 et du but refusé à Alain Côté en 1987. Cette décision controversée de l’arbitre Kerry Fraser fait encore jaser 35 ans plus tard.
C’est pour faire revivre cette intense rivalité, une des plus importantes dans le sport professionnel en Amérique du Nord, qu’une série documentaire sera rendue disponible dès le vendredi 29 novembre sur la plateforme Vrai. La série de huit épisodes ramènera bon nombre d’amateurs de hockey à l’époque de la guerre froide, du Walkman, du mouvement indépendantiste, de MusiquePlus, du SIDA et de E.T.
C’est à la Cage de Boucherville que les médias étaient convoqués pour visionner deux des épisodes de la série, scénarisée par Réjean Tremblay et Mathias Brunet et produite par Fair-Play. Bergeron, Perron, Côté, Delorme, Deblois, Bédard, Ménick et d’autres acteurs de cette grande époque étaient présents pour ce dévoilement médiatique.
La série jette un regard sur cette rivalité d’un point de vue sportif, bien sûr, mais aussi beaucoup d’un point de vue sociologique, de sorte qu’elle pourra plaire non seulement aux amateurs de hockey mais à toutes celles et ceux qui veulent revisiter cette période de notre histoire avec un recul de plus de 25 ans, période pendant laquelle cette intense rivalité s’est finalement transformée en élément rassembleur pour le Québec.
Dès le départ, la série nous plonge dans l’univers du hockey avec des images de neige, de glace et des couleurs vibrantes. Sans perdre de temps, elle nous transporte au printemps 1982, alors que les deux clubs s’affrontent pour la première fois en séries. Les Nordiques venaient de faire leur entrée dans la même division que les Canadiens et ce printemps prouve que tout sépare les deux équipes, à part le fait qu’elles jouent toutes les deux au hockey.
Canadiens-Nordiques, c’est le rouge contre le bleu, c’est Montréal contre les régions, c’est la petite organisation contre la grande, c’est Molson contre O’Keefe, c’est toute la polarité qui a caractérisé la société québécoise dans cette période tumultueuse. C’est aussi le début d’une nouvelle ère pour les Canadiens, dont les dirigeants et les entraîneurs, pratiquement tous anglophones, sont remplacés par des Québécois. Les Corey, Savard, Lemaire remplacent alors les McCammon, Grundman et Berry. Il n’était pas question pour l’équipe de Montréal de laisser les Nordiques devenir l’équipe de la province, équipe qui était dirigée par les Aubut, Filion et Bergeron.
La série fait aussi une grande place aux acteurs de cette rivalité. Au total, plus de 100 entrevues ont été réalisées pour la préparation de ce documentaire. On y retrouve le regretté Guy Lafleur et même Marcel Aubut, qui se fait pourtant discret depuis plusieurs années, pour les raisons qu’on connaît, de même que d’innombrables joueurs, entraîneurs, journalistes, artistes et partisans. Leurs propos sont supportés par des images d’archives, principalement celles des matchs des séries qui ont façonné la rivalité.
Alors que la série avance, on comprend que le feu de la bataille de l’autoroute 20 est constamment alimenté par les journalistes et les médias, qui développent leur propre rivalité entre eux, jusqu’à se rendre jusqu’aux coups dans certains cas. Décidément, la rivalité Montréal-Québec est intense.
Alors que les Nordiques traversent une période difficile à la fin des années 80 (ils ratent les séries pendant 5 années consécutives), le documentaire s’attarde à la saga d’Eric Lindros, premier choix au repêchage qui refuse catégoriquement de jouer à Québec, dans un marché que sa mère considère trop petit pour son fils vedette. Échangé à Philadelphie pour 5 joueurs et 18 millions de dollars, dans la plus grande transaction de l’histoire de la LNH à ce moment, le joueur ontarien marquera les souvenirs des amateurs des Nordiques mais permettra aussi au club de redevenir une puissance de la ligue, grâce à Peter Forsberg et ses jeunes coéquipiers nommés Nolan, Sakic, etc.
La série raconte (et montre) également des anecdotes savoureuses, incluant celle où Ron Hextall se fait bloquer le cercle de mise en jeu par Mario Roberge pendant la période d’échauffement du 3e match de la série demi-finale de division en 1993. Le gardien des Nordiques se voit ainsi privé de son rituel d’avant-match et perd son sang-froid pendant la partie. Il ouvre ainsi la porte aux Canadiens, qui amorcent une incroyable poussée de victoires en route vers la dernière Coupe Stanley de leur histoire jusqu’à maintenant. Les Nordiques et les Canadiens ne s’affronteront plus en séries éliminatoires et la rivalité prend fin avec le départ des hommes en bleu à l’été 1995.
«Canadiens Nordiques – La rivalité» est une série qui passionnera assurément les amateurs de hockey de la province, surtout ceux qui ont vécu cette période de 15 années. Mais elle intéressera aussi les amateurs plus jeunes, pour qui les Canadiens sont, et ont toujours été, la seule équipe québécoise de la LNH. Les huit épisodes seront rendus disponibles dès le 29 novembre sur la plateforme Vrai, accessible pour les abonnés Vidéotron via Helix et aussi sur l’application QUB pour les non-abonnés.
Je m’en voudrais en terminant de ne pas mentionner une autre excellente série documentaire, cette fois sur la rivalité Bruins-Canadiens, vieille de 100 ans. Cette série de 4 épisodes est diffusée par RDS. C’est également très bien réalisé et les images d’archives y sont vraiment intéressantes.
Christian Gingras, ISQ.media